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  • Dylan Pernot

LA COLOMBIE, UN PAYS RYTHMÉ PAR LA VIOLENCE

Depuis quelques années, la Colombie tente d’améliorer son image sur la scène internationale et espère tirer un trait sur le conflit armé interne qui a entraîné la mort de plus de 215 000 civils en soixante ans, entre 1958 et 2018. Effectivement, grâce à un développement politique, économique et social, le pays semble se transformer en une terre d'opportunités. L’année 2017 « restera dans l’histoire comme la plus sûre en quatre décennies » déclarait le ministre de la Défense de l’époque, Luis Carlos Villega, avec un taux d’homicides descendu à 23 pour 100 000 habitants. Des chiffres qui ne reflètent pourtant pas la réalité du conflit armé qui, depuis les années 1960, gouverne la vie des populations civiles, la plupart des Colombiens n’ayant jamais connu la paix. À l’heure où l’épidémie de coronavirus touche le monde entier et a fait plus de 42 000 morts en Colombie, le pays doit également faire face à une très forte résurgence de la violence.


L’accord de paix colombien de 2016 : un faux espoir ?


Le 23 août 2016, après 52 ans de conflit, le gouvernement colombien et la guérilla des Forces Armées Révolutionnaires en Colombie (FARC) annonçaient un accord de cessez-le-feu définitif. Quatre ans après, la Colombie est toujours en proie à la violence.

Malgré cet accord de paix signé avec les FARC, le conflit s’est néanmoins poursuivi entre le gouvernement et les guérillas encore en place telle que l’ELN (Armée de libération nationale) qui constituait, avant le retrait des FARC, le second groupe rebelle le plus important du pays. Fondée en 1964, cette entité est répertoriée en tant qu’organisation terroriste sur la liste établie par le Conseil de l’Union européenne depuis une décision du 30 juin 2020.


Le 15 décembre 2020, l’Organisation des Nations Unies recensait 375 meurtres en Colombie en 2020. Parmi ces meurtres, le Bureau du Commissaire aux droits de l’Homme relève la mort de 255 personnes dans 66 massacres et le meurtre de 120 défenseurs des droits de l’Homme. En juillet 2020 pourtant, le chef de la mission de l’ONU en Colombie, Carlos Ruiz Massieu insistait sur le fait que les gains de la paix « dument gagnés » devaient être protégés et préservés. L’inverse s’est finalement produit, puisque la Mission de vérification des Nations Unies en Colombie enregistre en plus des 375 meurtres commis en 2020, 244 meurtres d’anciens combattants des FARC depuis la signature de l’accord de paix.


Rapidement, les Nations Unies ont fait part de leur soutien aux populations victimes de cette spirale de violence, constatant que ces tueries ont lieu principalement dans des lieux où perdure la pauvreté et se développe une économie souterraine. La Haut-Commissaire aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, a, de son côté, interpellé le Gouvernement colombien en lui conseillant de prendre des mesures concrètes pour protéger la population. En effet, selon l’ONU, ce climat d’insécurité a de « graves conséquences humanitaires ». Actuellement, l’Etat colombien n’est que trop peu présent dans les zones de conflit selon les Nations Unies, ce qui pourrait expliquer la persistance du conflit armé colombien.


Mme Bachelet rappelle que l’accord de paix signé en 2016 par le gouvernement colombien prévoyait que la Commission nationale colombienne devrait garantir la sécurité des populations civiles mais également des anciens FARC notamment par une politique publique visant à démanteler « les groupes criminels qui ont succédé aux structures paramilitaires et à leurs réseaux de soutien ». Elle regrette que la violence se soit normalisée en Colombie après des décennies de conflit armé.


Une spirale de la violence accentuée par les conséquences de la crise sanitaire


La pandémie de Covid-19 a joué un rôle prépondérant dans l’accentuation des violences en Colombie cette année. Avec 1,5 millions de cas recensés, le pays entier est particulièrement touché sur le plan sanitaire. D’un point de vue économique, ce sont surtout les femmes qui souffrent de cette crise. Au second semestre 2020, seules 6,7 millions de femmes travaillent contre 9,2 millions à la même période en 2019, selon le département administratif national des statistiques.


Le nombre de Colombiennes sans emploi augmente, tout comme le nombre de féminicides. Du mois de janvier au mois de juin 2020, ce sont deux femmes par jour qui sont décédées sous les coups d’un conjoint ou d’un proche en Colombie. Un chiffre alarmant que le journal El País explique à la fois par l’absence de mesure concrète pour lutter contre les violences faites aux femmes et une culture machiste en Colombie. Pour Cécile de Caunes, conseillère internationale de la partie signataire de l'Accord de paix devant le Conseil de sécurité des Nations Unies, les femmes doivent être davantage prises en considération. Elle relève avec regret que « seuls 4% des signataires de l’accord de paix sont des femmes » qui pourtant représentent la moitié du peuple colombien.


D’autre part, les indigènes sont également les victimes d’une Colombie qui n’a pas remporté son duel contre la violence. Ces Amérindiens, issus de diverses ethnies du Cauca, l’une des régions les plus touchées par les groupes armés, ont manifesté leur crainte et la nécessité d’un soutien de la part du gouvernement. Néanmoins, aucune réponse concrète n’a été apportée par le Président colombien Ivan Duque afin d’endiguer l’intensification de ces violences dans la région.


Le 23 janvier 2020, au moment de clôturer sa mission en Colombie dans le cadre de son examen préliminaire de la situation du pays, le Bureau de la Procureure de la Cour pénale internationale avait réitéré son soutien à l’égard du processus de paix en cours. Qu’en serait-il aujourd’hui, alors que l’année 2020 a été marquée par une véritable recrudescence de la violence ?


Dylan Pernot


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