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La Cour suprême israélienne autorise la destruction du village de Khan al-Ahmar

Mercredi 5 septembre 2018, la Cour suprême israélienne a autorisé la destruction du village bédouin de Khan al-Ahmar. En rejetant les recours qui avaient été déposés contre sa démolition, la Cour permet aux autorités israéliennes de passer à l’action sept jours après sa décision, soit dès que la mesure judiciaire suspensive sera levée. Dans le courant de la semaine, le village pourrait donc purement et simplement disparaître. L’un des membres de Reesah Aix-en-Provence avait pu se rendre sur place en juillet dernier. Il raconte.


Nous arrivons à Khan al-Ahmar dans le courant de la matinée. Nous sommes partis relativement tôt de Ramallah, située à une quinzaine de kilomètres au nord-ouest, mais notre mini-bus a été pris dans les embouteillages aux abords du check-point vers Jérusalem.


Nous n’avons pas traversé ce dernier, mais le bouchon qu’il crée paralyse une grande partie de l’avenue que nous empruntons. Une fois le trajet en mini-bus terminé, nous marchons encore quelques centaines de mètres sous un soleil de plomb avant d’arriver à destination.

Alors que nous approchons, nous repérons deux colonies israéliennes situées de part et d’autre du village. La destruction de ce dernier doit permettre de construire une route qui les reliera, coupant ainsi en deux une partie du territoire palestinien à cet endroit. Une fois arrivés aux abords du village, nous tentons d’y pénétrer. Un soldat israélien se détache de l’arbre à l’ombre duquel il s’était abrité et vient à notre rencontre. Il nous fait vite comprendre qu’il nous est interdit d’entrer. Nous décidons alors de faire le tour et cherchons une entrée qui ne serait pas gardée par l’armée israélienne. Quelques habitations plus loin, un habitant nous fait entrer directement dans sa maison, puis nous guide à travers le village, à l’abri des arbres. Nous entrons alors dans une autre habitation, depuis laquelle nous pouvons mieux observer.

Le premier constat que nous faisons est celui de la présence des soldats israéliens partout où notre œil peut porter : Khan al-Ahmar en est plein, qui couvrent chaque entrée et patrouillent sans se soucier des habitants.




Plusieurs restent sous les arbres, tentant tant bien que mal d'échapper au soleil. Au centre, un groupe semble garder un bulldozer, devenu allégorie moderne de l’épée de Damoclès tant il rappelle à tous que la destruction des bâtiments pourrait commen-cer à tout moment.

Nous partageons notre tour d’observation improvisée avec trois activistes venus d’une autre ville de Cisjordanie qui nous affirment qu’il est impossible, pour eux comme pour nous, d’aller plus loin. En contrebas, la présence israélienne est en effet renforcée : c’est là-bas que des militants palestiniens (souvent les habitants du village eux-mêmes) et internationaux manifestent depuis quelques temps déjà contre la démolition du village. La veille, des heurtsont éclatés entre les soldats et les militants, menant à l’incarcération de plusieurs de ces derniers. Pour atteindre cette zone, il nous faudrait représenter un média venu couvrir l’évènement. En effet, si les simples curieux que nous sommes ne sont pas du tout les bienvenus, l’opération, ses préparatifs et la gestion des manifestations ne sont absolument pas tenues secrètes : tout est assumé par les autorités israéliennes. Pourtant, la politique de colonisation israélienne va à l’encontre du droit international, et notamment des Conventions de Genève (pour plus d’informations à ce sujet, voir le travail de Capucine Valbon intitulé Droit international et colonisation israélienne). Mais cela n’empêche en rien le travail de colonisation de perdurer, et ce sans dissimulation aucune. Pourquoi les autorités s’en soucieraient-elles quand les seules réactions de l’ONU à ce sujet ne sont que symboliques ? Durant l’été 2017, Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien, avait même déclaré fièrement : « Aucun gouvernement n’a fait autant pour la colonisation que celui que je dirige. » Certes, la démolition de Khan al-Ahmar ne se fera pas dans les semaines qui suivront notre passage. Mais il s’agit surtout pour les autorités israéliennes d’attendre quelques temps que l’attention médiatique ne retombe avant de commencer la destruction. Selon les habitants du village et les activistes que nous avons rencontrés, la technique a déjà été maintes et maintes fois employée. En 2014, sans compter la partie est de Jérusalem, située en territoire palestinien mais occupée par Israël, 400 000 personnes vivaient dans des colonies en Cisjordanie. Parallèlement, l'obtention d'un permis de construire pour un Palestinien est extrêmement complexe et dépend uniquement du bon vouloir des autorités israéliennes. C'est pourquoi des bâtiments sont parfois construits sans autorisation, comme c'est le cas de l'école et de quelques maisons de Khan al-Ahmar. La Cour avait déjà, en mai dernier, rejeté un appel des habitants à ne pas détruire leurs habitations. Le gouvernement britannique avait alors appelé Israël à faire marche arrière, sans succès. Face à la décision finale prise le 5 septembre dernier, ils est prévu que les 173 habitants puissent s'installer à côté du village d'Abou Dis, situé à environ dix kilomètres, non loin d'une décharge. En repartant de Khan al-Ahmar, quelque chose nous a heurté. Pendant que nous étions à l’intérieur, une vingtaine de personnes avaient pris position sur la colline qui surplombe le village et brandissaient désormais de grands drapeaux israéliens.





Elles paraissaient venir narguer les habitants, leur rappeler que cet endroit ne serait bientôt plus à eux et qu’ils n’auraient d’autre choix que de laisser la place. Elles semblaient n’avoir aucun doute sur l’absence d’impact qu’auraient les manifesta-tions et tentatives de recours contre la démolition.

En contrebas, à moins de deux-cents mètres du village, le bruit des pelleteuses en plein travail leur donnait déjà raison.




RÉESAH

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