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  • Emilie Schollier

REPRISE DE L’ÉPIDÉMIE DE CHOLÉRA : LE LIBAN FACE À UNE CRISE ÉCONOMIQUE, SOCIALE ET SANITAIRE


Une petite fille marche dans l'eau, au milieu des tentes d'un camp de réfugiés syriens près de Qab Elias, dans la vallée de la Bekaa au Liban, le 18 octobre 2022.

Au cœur du Moyen-Orient, le Liban est un État marqué par de nombreuses crises. Durant les années 1950, le régime libéral alors en place a permis un développement économique conséquent, ce qui lui a valu le nom de « Suisse du Moyen-Orient ». Cependant, l’instabilité politique et la guerre civile des années 1970 ont bouleversé la situation économique, sanitaire et sociale du Liban, plongeant le pays dans une crise durable sans précédent.


Récemment, le pays a connu de nombreux bouleversements tels que l’explosion du port de Beyrouth du 4 août 2020 ou encore l’accueil d’1,5 million de réfugiés syriens fuyant le conflit éponyme. Par conséquent, selon la Banque mondiale, le peuple libanais traverse l’une des crises « les plus graves au monde ». Les habitants font face à une lourde inflation, la chute de la valeur de la livre libanaise rendant l’accès aux biens de base difficile ou encore à des pénuries d’énergie . De plus, le dysfonctionnement des services publiques et les tensions politiques entre les dirigeants du pays ont pour effet d’accentuer les crises existantes et en créent de nouvelles.


Depuis le 6 octobre 2022, le ministre libanais chargé de la Santé, Firas Abiad, tire la sonnette d’alarme au sujet de l’accélération de la propagation d’une épidémie de choléra. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (ci-après OMS), le choléra est « une maladie diarrhéique aiguë, dont on peut mourir en quelques heures en l’absence de traitement ». Le 19 octobre, 169 cas dont 5 décès ont été confirmés par le gouvernement libanais, dont 80 au cours des dernières 48 heures. Il s’agit du premier retour du choléra depuis 1993. Cependant, les familles libanaises ont un accès restreint aux médicaments, ce qui ne leur permet pas de soigner et guérir les personnes gravement infectées ; encore moins d’arrêter la propagation de l’épidémie. Le nombre de vaccins est également limité : par conséquent, une seule dose est administrée, sur les deux nécessaires.


En outre, l’OMS a identifié certains facteurs de risques. Principalement, le choléra se transmet rapidement dans des zones où l’accès à une eau salubre, voire d'autres services d’assainissement, sont limités. Or, sur le territoire libanais, les systèmes d’approvisionnement en eau sont insuffisants pour satisfaire les besoins de la population. Pour le ministre de la Santé, le difficile accès à l’eau potable est « [l’]une des principales raisons » de la reprise de l’épidémie de choléra car l’eau contaminée est utilisée par les habitants à la fois dans leur quotidien mais également pour irriguer les cultures.

Pourtant, L’UNICEF a lancé une alerte dès 2020 exprimant que plus de quatre millions de personnes, dont un million de réfugiés, risquaient de ne plus avoir accès à l’eau potable au Liban. Ce manque pourrait également atteindre les établissements publics tels que les hôpitaux ou encore les écoles. La faible accessibilité à l’eau ajoute donc une difficulté supplémentaire au système de santé libanais déjà fragilisé par le contexte socio-économique de la crise ainsi que par la destruction de nombreux hôpitaux majeurs à Beyrouth. Dès lors, le Liban ne semble pas avoir, dans le contexte actuel, assez de moyens matériels et financiers pour limiter l’avancée de l’épidémie.


Qui plus est, l’accueil d’au moins un million de Syriens fuyant les conflits pourrait expliquer la propagation accrue de la maladie. Au Liban, la majorité des réfugiés vivent dans des conditions d’insalubrité sévère ; entassés dans des lieux dangereux et ne pouvant pas répondre à leurs besoins essentiels comme l’accès aux denrées alimentaires et à l’eau potable. Le milieu de vie favorise alors le développement et la propagation du choléra chez des populations fragilisées.


Face à cette situation, il est nécessaire pour le gouvernement de mobiliser des aides pour répondre aux besoins de la population libanaise. C'est dans cette optique que, depuis la recrudescence de l’épidémie, l’UNICEF, l’OMS et des ONG partenaires collaborent avec le ministère de la Santé publique libanais. Pour répondre à l’urgence, plusieurs aides matérielles ont été apportées, telles que l’envoi de 80 000 litres de carburants pour les stations de pompage d'eau et les stations de traitement des eaux usées ou encore la fourniture de matériel médical. Cependant, au-delà des mesures urgentes, il est essentiel pour ces acteurs humanitaires de répondre aux causes de l’épidémie pour résoudre la crise de façon durable. Des projets sont envisagés à long terme, tels que la mise en œuvre d’entretiens régulier des systèmes de distributions d’eau.


Émilie Schollier


Image © - Mohamed Azakir, REUTERS

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