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ROUTE VERS LA MEDITERRANEE : LE DOUBLE PERIL DES FEMMES MIGRANTES

  • Éléa Daziano
  • il y a 8 heures
  • 5 min de lecture

Au cours du mois de novembre 2024, l’ONU à  partagé un rapport publié par le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) sur les dangers des migrations traversant la Méditerranée avec une statistique qui fait froid dans le dos : 90% des migrantes passant par la Méditerranée sont victimes de viol



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L’horreur de cette réalité nous amène à nous poser de sérieuses questions sur les conditions dramatiques et dangereuses que subissent les migrants, mais tout particulièrement les femmes, qui de par le fait qu’elles sont femmes, doivent traverser un périple d’autant plus insurmontable. Nous allons donc essayer de décortiquer ce phénomène. 



La Méditerranée, frontière mortelle des migrations vers l'Europe

La traversée de la Méditerranée est une des principales routes pour les migrants qui souhaitent se déplacer vers le continent européen, on entend ici trois routes majeures : centrale, occidentale ou orientale. 


Entre 70 % et 80 % des passages migratoires vers l’Union européenne passent par la Méditerranée.


Sur l’ensemble des migrations à l'échelle planétaire, les femmes en font partie à hauteur égale que les hommes, mais ce n’est pas le cas en Méditerranée. Si on n'assiste depuis ces dernières années a une féminisation des routes maritimes, cette épopée méditerranéenne reste en très grande majorité faite par des hommes. Si les besoins spécifiques des femmes sont déjà moins pris en compte que ceux des hommes dans la société, alors dans un milieu dominé par la présence masculine, leur place est encore davantage marginalisée et leur voix moins entendue.


Mais si la traversée de la Méditerranée centrale est la route migratoire la plus empruntée comparée à celles occidentales ou orientales, elle est aussi considérée comme la plus meurtrière au monde. En 2024, près de 80 % des décès en Méditerranée ont eu lieu sur cette route. En tout en 2024, dans la région de la Méditerranée, environ 2 452 personnes sont mortes ou ont disparu lors de tentatives de traversée, et depuis 2014 on estime que plus de 30 000 migrants sont morts ou ont disparu en Méditerranée. En outre, le danger est immense et nous prouve encore une fois qu’aucun être humain ne quitte son pays de gaieté de cœur. 


Pour expliquer le terrible sort des femmes migrantes, on doit prendre en compte tout leur voyage. 


Le voyage vers l'Europe, une souffrance oubliée


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Sur cette carte on observe grâce au figuré rond gris plus ou moins gros en fonction de nombre de cas rapportés, les endroits où les risques d’abus sexuels ou de violence fondés sur le genre ont été identifiés. En effet le Centre sur la Migration Mixte (CMM) et autres collaborateurs, mettent en lumière les horreurs extrêmes auxquelles sont confrontés les réfugiés et les migrants sur les routes terrestres menant à la côte méditerranéenne de l’Afrique. 


Les réfugiés et les migrants rapportent être confrontés à de multiples formes d’abus et de violations des droits humains, parmi lesquelles figurent la détention arbitraire, la torture, les violences physiques et sexuelles, les enlèvements contre rançon, la traite et l’exploitation des êtres humains, la réduction en esclavage, le travail forcé, le vol, ainsi que les expulsions collectives, le refoulement et, trop souvent, la mort. 


En outre, dès le début de leur voyage, les femmes migrantes doivent traverser des lieux mettant en danger leur propre sécurité. Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) sonne l’alerte : plus de 60 millions de femmes et de filles dans le monde, déplacées de force ou apatrides, sont confrontées à un risque élevé de violences sexistes. Pourtant, les financements tels que ceux d’ONG comme International Organization for Migration (IOM) ou African Women’s Development Fund (AWDF) qui pourraient être destinés aux services essentiels pour les protéger, restent gravement insuffisants. 


Les auteurs de ces violences

La longueur du trajet augmente la vulnérabilité des victimes à de nouvelles violences sexuelles, y compris dans le pays de destination ou d’asile. Les violences sexistes et sexuelles sont à la fois un facteur qui pousse certaines personnes à quitter leur pays d’origine et un risque encouru tout au long du parcours migratoire.


Les violences sexistes et sexuelles constituent malheureusement une épreuve quasi systématique pour les femmes migrantes et réfugiées. Les individus à l'origine de ces violences sont souvent des gangs criminels, des passeurs ou d’autres acteurs (notamment des individus profitant de la vulnérabilité des migrantes). 


Dans de nombreux cas, les femmes sont contraintes de recourir au travail du sexe pour financer leur voyage. Cela peut se matérialiser par des « pots-de-vin » sous forme de faveurs sexuelles, destinées à elles-mêmes, à leurs enfants ou proches, et parfois même à des groupes entiers de migrants avec lesquels elles voyagent. Elles, comme les autres migrants, ne dépendent donc pas uniquement de leurs propres moyens, mais doivent faire appel à des services très coûteux, parfois pour une seule étape du trajet. À titre d’exemple, en 2018, le passage par la Méditerranée centrale vers l’Italie était estimé à environ 1 800 €.


Demander des faveurs sexuelles en échange d’une ressource vitale pour la personne en face, constitue, même quand l’individu finit par accepter cela, une violence sexuelle. De nombreuses personnes interrogées ont déclaré avoir été témoins ou victimes de viols et d’agressions sexuelles, et ont souvent mentionné des relations d’exploitation liées à l’accès à des besoins essentiels tels que le logement, la protection et l’argent. 


Les auteurs identifiés sont donc principalement des hommes, avec une emprise hiérarchique sur leurs victimes : des gangs criminels, des groupes armés, des milices, des passeurs, et, dans certains cas, des militaires et des fonctionnaires gouvernementaux. Dans des cas plus extrêmes, par exemple lors d'enlèvements, certaines femmes sont forcées de se marier et d’avoir des enfants avec leurs ravisseurs


« Les passeurs pour lesquels nous devions travailler nous battaient constamment et nous traitaient comme du bétail. Ils nous harcelaient parfois physiquement et se moquaient de nous. Je souffre encore physiquement et mentalement de mon voyage. » Témoignage anonymisé pour des raisons de sécurité, octobre 2022, rapport ONU de novembre 24


Les difficultés d'accès à la justice

Si le rapport de l’ONU a affirmé que les femmes traversant la Méditerranée sont pour 90% d’elles victimes de viol, ceci ne garantit pas, au contraire, un recours à la justice pour ces victimes. D’abord le manque d'accès à la justice mais aussi la peur, la honte, les traumatismes et la stigmatisation par les familles et les communautés empêchent souvent les femmes et les filles de signaler les abus. On peut aussi mentionner que les garçons et les hommes sont encore moins susceptibles de le faire, notamment en raison de la stigmatisation et de la honte.


La précarité des mères migrantes

Une situation propre à la gente féminine, car le nombre d’hommes avec des enfants à charge sur les routes migratoires est infime, est comme vous l’aurez compris le monde de la maternité. Être responsables d’enfants en bas âge, voire être enceintes sur les routes migratoires ou une fois nouvellement installées dans un pays, ces facteurs augmentent la précarité des conditions de vie de ces migrantes. 


Inutile de souligner l’angoisse et la détresse des femmes migrantes qui doivent donner naissance dans des conditions atroces, en mer ou dans des camps de réfugiés. Mais même une fois installées, le manque de structures adaptées pour elles constituent aussi une violence. On estime qu’aujourd’hui en France  plus de 2 000 enfants dorment dans la rue


Pour elles, les soins et services publics de santé ne sont pas accessibles : de choix déchirants comme l’automédication ou le renoncement aux soins à cause des frais, même en cas de risques de complications ou de douleurs liées à la grossesse. Les inégalités sociales d'accès aux soins prénatals et de santé maternelle sont donc importantes. 


En somme, les routes migratoires constituent, par nature, une succession d’épreuves pour les migrants, contraints de se placer dans des situations les exposant à de nombreux risques et abus, mettant directement en danger leur sécurité et leur intégrité, et pouvant même conduire à la mort au cours du périple.


Au sein de ce parcours de souffrance, il ne faut cependant pas oublier la situation particulière des femmes, souvent confrontées à des violences et à des dangers supplémentaires du seul fait de leur condition féminine.



Éléa Daziano


Image © - SOS Méditerranée / Flavio Gasperini

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